Des mots, des rythmes et du blues au Lycée Léonard de Vinci à Blanquefort avec Blackbird Hill
En février 2019, Maxime Conan et Théo Jude du groupe Blackbird Hill ont passé trois jours au lycée Léonard de Vinci à Blanquefort avec quelques élèves de terminale MMTP/TISEC… ensemble ils ont écrit, interprété et enregistré un blues, dans le cadre du parcours académique « Des mots et des rythmes »
Les Parcours Autour de la chanson : des Mots et des Rythmes sont pensés et construits par les équipes pédagogiques, les partenaires culturels locaux et des artistes intervenants avec une volonté commune : éveiller la créativité et construire un projet artistique où chacun puisse trouver sa place. Ces parcours sont proposés et soutenus par l’Éducation Nationale, la Direction Régionale des Affaires Culturelles, le conseil départemental, les établissements scolaires et culturels, ils invitent les collégiens & lycéens à découvrir et à se saisir du cheminement de la création artistique. Delphine Mathis, enseignante de Lettres et d’Histoire au lycée Léonard de Vinci à Blanquefort est venue à la rencontre du pôle Médiation du Krakatoa en mai 2018 avec l’envie de proposer à ses élèves une expérience artistique à vivre avec Blackbird Hill. Delphine a préparé cette résidence avec sa collègue Marie Pescador, enseignante d'anglais qui a abordé les "protest song" avec les élèves. Après plusieurs temps de travail commun pour construire la résidence, les médiatrices du Krakatoa sont allées rencontrer les élèves de Delphine pour échanger, réfléchir ensemble à ce que fait la musique et préparer le venue des musiciens… et avec les mots des élèves, de Delphine et des artistes, le pôle Médiation vous raconte cette jolie aventure artistique ! |
Faire connaissance
Le 4 février 2019, au petit matin, les musiciens arrivent à Blanquefort, dans le froid saisissant de l’hiver, munis de leurs guitares et batterie, ils parcourent les grands couloirs du lycée Léonard de Vinci bordés de lumière et de pins accompagnés par Delphine Mathis qui les guide dans sa classe…
« Nous n'avions rien en commun, à part l'intention de passer quelques jours ensemble pour écrire une chanson. Il a fallu faire nos preuves musicalement en jouant quelques morceaux », se souvient Maxime Conan.
Les deux musiciens se présentent aux élèves en musique, en semi-acoustique, dès les premières notes, la classe est plongée dans l’univers de Blackbird Hill et découvrent une belle énergie qui circule entre les deux musiciens. Les musiciens font la connaissance d’élèves curieux, attentifs et sur la réserve. Les élèves rencontrent des musiciens à l’écoute : « Ils nous questionnaient et nous écoutaient vraiment », témoigne l’un d’eux.
Ils échangent, les musiciens racontent leur métier, parle de leurs influences, les élèves partagent leurs écoutes, leurs pratiques de la musique…
Maxime et Théo leurs présentent la base instrumentale imaginée pour leur chanson, un petit blues qui n’attend que les idées de la classe pour se déployer pleinement.
Écrire
Par petits groupes, les élèves ont cherché quelques thématiques, quelques uns griffonnent des idées sur leurs feuilles de brouillon, certains veulent parler d’argent, de solitude, d’amitiés, de différence, d’autres se questionnent sur ce monde qui les entoure et cette terre qui se réchauffe un peu trop. Les musiciens prennent le temps d’échanger avec chaque groupe, les accompagnent dans l’écriture… « mais ça je sais le dire en espagnol mais pas en anglais (…) tu peux l’écrire en espagnol, on essaie ? ». Puis chaque groupe présente à la classe ses idées, ses mots et ses bouts de phrase, les musiciens font le lien entre les couplets et ensemble ils tissent le fil rouge de leur chanson. L’anglais, l’espagnol et le français s’entremêlent... leur chanson parle de leur avenir dans un monde qui ne tourne pas bien rond, d’humanité et de jugements. « Lors de l'écriture des textes des liens se sont construits petit à petit entre eux et nous. C'est là que c'est construit ce sentiment de faire équipe. Je suis persuadé que pour la plupart d'entre eux, ils ne s'imaginaient pas capable de produire ce qu'ils ont écrit. », raconte Maxime Conan. Après s’être mis tous d’accord sur les mots et le sens de leur chanson, les musiciens et les élèves échangent sur la musicalité, il s’agit maintenant d’ajuster leurs couplets pour qu’ils « rentrent » dans la musique. Les élèves participent, certains expriment leurs ressentis, leurs envies : « est-ce qu’à la fin, vous pouvez le jouer plus lentement ou moins fort, comme si on baissait le son ». Les musiciens sont attentifs, cherchent avec eux, essayent, leur expliquent les nuances, les différences entre « moins fort » et « plus lentement » et font des ponts avec l’histoire des musiques actuelles et des anecdotes groupes de musique.
Chanter
Ils répètent plusieurs fois la chanson, puis l’enregistrent en chant chorale. Les élèves comprennent que le silence est important pendant l’enregistrement, le micro posé au centre de leur groupe captent tous les sons, les bruits de chaises, les frottements de vêtements, les petits rires… Certains chantent avec conviction, d’autres sont plus timides, après plusieurs essais, ils sentent que la dernière prise est la bonne. Delphine Mathis, observe : « J’ai aimé leur attention, leur écoute, leur gène et leurs voix portées par la musique. » Les élèves et les musiciens prolongent cette expérience artistique partagée en jouant leur chanson à une autre classe de terminale venue s’installer dans La Maison des Lycéens, en tout intimité. Les spectateurs sont prévenus : les élèves de Terminale viennent de vivre trois jours de création en cocon avec Blackbird Hill, sortir de cette bulle et interpréter leur chanson en public, même restreint, peut être intimidant... écoute et bienveillance sont invités ! Et la classe musicienne a été vivement applaudie et encouragée ! Blackbird Hill joue quelques uns de leurs morceaux, les élèves sont transportés…
« Je n'imaginais pas que cette résidence se terminerait en interprétant la chanson terminée, en format chorale. Je ne m'attendais pas à autant d'entrain et d'enthousiasme de leur part pour chanter. Chanter, c'est se livrer au reste du groupe. Maintenant je suis persuadé qu'ils en avaient besoin. La preuve avec cette chanson, qui dénonce en parti les regards accusateurs et le jugement. », raconte Maxime.
Delphine Mathis, leur enseignante : « De même, j’ai entendu des élèves dire qu’ils faisaient « attention au sens des paroles parce que les artistes ont beaucoup réfléchi à leur chanson » ».
Beaucoup m’ont dit qu’ils n’écoutaient plus « la musique pareil » « Depuis, j’écoute du blues, c’est trop bien car de belles images viennent dans ma tête ». « Avant, on était tous centrés sur la même musique, à l’étroit. On nous a ouvert à d’autres styles ». Beaucoup m’ont dit aussi qu’ils avaient « écouté d’autres chansons du groupe » « parce que Max, il a une belle voix qui nous porte ».
Revenir aux racines
Pour prolonger cette expérience, les médiatrices du Krakatoa ont proposé à Delphine et à sa classe de venir au Krakatoa pour découvrir la salle... et pour nourrir le dialogue autour de la musique entamée avec Blackbird Hill, les élèves sont revenus aux racines des musiques actuelles avec la conférence - concert Blues is Roots. Un bel après-midi de découverte et d’échange partagée avec Grégory Desgranges, Hugo Berrouet et Fredovitch !
« Quand j'en discute avec Théo, on réalise qu'il nous arrive encore d'avoir le refrain qu'ils ont écrit dans la tête. », Maxime Conan